Contenu de l'article
La fixation du loyer lors du renouvellement d’un bail commercial est souvent source de contentieux entre le bailleur et le locataire. Dans cet article, nous vous proposons un éclairage sur l’article L145-24 du Code de commerce, qui prévoit la fixation judiciaire du loyer en cas de désaccord entre les parties. Nous aborderons notamment les conditions d’application de cette disposition, la procédure à suivre et les critères retenus par les juges pour déterminer le montant du nouveau loyer.
Le contexte de l’article L145-24
L’article L145-24 du Code de commerce s’inscrit dans le cadre des dispositions légales régissant les baux commerciaux, qui ont pour objectif de protéger le locataire commerçant et d’assurer un certain équilibre entre les droits et obligations des parties. Le renouvellement du bail commercial est un moment clé de cette relation contractuelle, puisqu’il permet au locataire de poursuivre son activité dans les mêmes conditions que précédemment, tout en offrant au bailleur la possibilité d’ajuster le montant du loyer à l’évolution du marché.
En principe, le loyer doit être fixé librement par accord entre le bailleur et le locataire lors du renouvellement. Toutefois, en cas de désaccord sur ce montant, l’article L145-24 prévoit que celui-ci peut être fixé par voie judiciaire. Cette disposition constitue ainsi une garantie pour les parties, en permettant de faire trancher leur différend par un juge, qui appréciera les conditions de fixation du loyer en fonction des éléments concrets et objectifs du marché.
Les conditions d’application de l’article L145-24
Pour que la fixation judiciaire du loyer puisse être demandée sur le fondement de l’article L145-24, plusieurs conditions doivent être remplies :
- Il doit exister un désaccord entre le bailleur et le locataire sur le montant du loyer lors du renouvellement. Ce désaccord peut résulter d’une absence totale de proposition de la part de l’une des parties, d’un refus pur et simple ou encore d’une contre-proposition insatisfaisante pour l’autre partie.
- Le litige doit porter sur la fixation d’un loyer à la date d’effet du renouvellement, c’est-à-dire au terme du bail initial ou au terme de chaque période triennale si le bail a été renouvelé tacitement. La fixation judiciaire ne s’applique pas aux litiges relatifs aux révisions triennales du loyer, qui sont soumises à des règles spécifiques (article L145-38 et suivants).
- La demande en fixation judiciaire doit être introduite devant le tribunal judiciaire compétent, qui est en principe celui dans le ressort duquel se situe l’immeuble loué. La saisine du tribunal doit respecter certaines formalités prévues par la loi et les règles de procédure civile (assignation, constitution d’avocat, etc.).
La procédure judiciaire et ses conséquences
Une fois le tribunal saisi, celui-ci procède à une instruction contradictoire des demandes et des moyens des parties. Le juge peut ordonner toutes mesures d’instruction utiles pour éclairer sa décision, telles que la désignation d’un expert pour évaluer le montant du loyer en fonction des éléments du marché. Les parties sont alors invitées à produire leurs observations sur le rapport d’expertise et à faire valoir leurs arguments concernant la fixation du loyer.
À l’issue de cette instruction, le juge rend sa décision en fixant le montant du loyer renouvelé. Cette décision est susceptible d’appel devant la cour d’appel compétente dans un délai de 30 jours à compter de sa notification aux parties. Le jugement rendu par le tribunal ou l’arrêt de la cour d’appel deviennent alors exécutoires et s’imposent aux parties, qui sont tenues de respecter les nouvelles modalités contractuelles fixées par la juridiction.
Les critères retenus par les juges pour fixer le loyer
Pour fixer le montant du loyer renouvelé en application de l’article L145-24, les juges se fondent sur plusieurs critères objectifs :
- La comparaison avec les loyers pratiqués pour des locaux similaires situés dans le même secteur géographique, en tenant compte notamment de la surface, de la destination commerciale, de l’emplacement et de l’état des lieux. Cette comparaison peut être effectuée à partir des baux en cours ou ayant été conclus récemment, ainsi qu’à partir d’études de marché ou de données statistiques.
- La prise en compte de la variation de l’indice des loyers commerciaux (ILC) ou, le cas échéant, de l’indice des loyers des activités tertiaires (ILAT), qui permettent de mesurer l’évolution du marché locatif et d’ajuster le montant du loyer en conséquence.
- L’examen des éléments propres aux parties, tels que la durée du bail initial, les obligations contractuelles du locataire (entretien, réparations, etc.) ou encore les avantages accordés par le bailleur (loyer dégressif, franchise, etc.).
Ainsi, la fixation judiciaire du loyer en application de l’article L145-24 constitue une solution efficace et équilibrée pour résoudre les désaccords entre bailleurs et locataires lors du renouvellement d’un bail commercial. Elle permet d’assurer une certaine sécurité juridique et financière pour les parties, en garantissant un loyer conforme aux conditions du marché et aux intérêts respectifs des parties.