Loi : la lutte contre la cyberhaine en quelques questions

Le 3 juillet, la proposition de loi (PPL) visant à lutter contre la haine en ligne est entrée en examen à l’Assemblée nationale en vue d’un vote pour le 9 juillet. Ce texte devrait être examiné par le Sénat à l’automne prochain pour une mise en application prévue pour le début de l’année 2020. Pour mieux appréhender les enjeux de cette future loi, ces quelques points vont certainement vous éclairer.

Comment est définie la « haine en ligne » ?

Ce texte législatif souligne que haine en ligne concerne les contenus injurieux ou incitant à la haine à raison de la religion, de la prétendue race, de l’ethnie, de l’orientation sexuelle, du sexe, de l’identité de genre ou du handicap d’une personne ou même d’un groupe de personnes. La définition s’est élargie après examen en Commission de loi, et comprend ainsi désormais :

  • La traite des êtres humains.
  • La mise à disposition de contenus pornographiques aux mineurs.
  • Le proxénétisme.
  • L’apologie du terrorisme.

Dans un communiqué commun, l’Association des Services Internet Communautaires (Asic), Syntec Numérique et Tech in France, les trois principaux lobbys numériques estiment que l’efficacité de la loi risquerait d’être compromise face à une telle définition au « périmètre beaucoup trop large ».

Par ailleurs, Cédric O, le secrétaire d’État chargé du Numérique quant à lui a indiqué qu’en plus de ces messages « manifestement illicites », les contenus « gris » subsistent également et soulèvent des interrogations. Pour aider les plates-formes à appréhender ce phénomène diffus, évolutif et variable, le gouvernement assure qu’un groupe de travail pluridisciplinaire sera mis sur pied.

Qui concerne-t-elle ?

Certes, le texte se focalise majoritairement sur l’encadrement du rôle des opérateurs en ligne. En revanche, Laetitia Avia a souligné que la loi repose sur un triptyque de responsabilisation : la société civile, les plateformes et aussi les auteurs des messages. Pour éradiquer l’impunité sur le web, les moteurs de recherche ainsi que les réseaux grand public devront supprimer en moins de 24 heures les messages haineux signalés par les utilisateurs. Ce délai prompt et ferme représente la principale innovation du texte. Pour les utilisateurs, la PPL prévoit d’ici au début de l’année 2020, un parquet spécialisé dans le numérique, avec la possibilité de porter plainte en ligne même. Cette entité traitera de manière spécifique les infractions qui se passent sur Internet.

Quelles sont les sanctions prévues ?

Si le délai de 24 heures n’est pas respecté par les plateformes, ces dernières encourent une amende qui peut atteindre jusqu’à 4% de leur chiffre d’affaires mondial suivant la « gravité et le caractère réitéré » des infractions. Ce montant peut parfaitement s’élever à quelques milliards d’euros étant donné les grands chiffres d’affaires des plateformes de nos jours.

En plus de la sanction administrative, en commission, les députés ont rajouté un délit pénal. En cas de refus de suppression d’un contenu, le responsable légal de la plateforme sera passible d’une amende de 250 000 euros et d’un an d’emprisonnement.

L’autorité administrative chargée de contrôler la bonne application de cette loi par les entreprises œuvrant dans ces domaines sera le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA). Le texte n’évoque pas spécialement des sanctions relatives aux auteurs des messages haineux. Les détracteurs du texte dénoncent aussi par ailleurs sur l’absence d’une autorité judiciaire dans le processus de contrôle de légalité.